Par Gaëtan Constant
Vous savez à quel point j’aime les images, et je vais vous en proposer une.
Admettons qu’un médecin prescrive une cure de désintoxication à un patient. Pour que sa santé s’améliore, il faudra un arrêt progressif de l’addiction, qui se comptera en mois ou en années. Mais que penseriez-vous d’un médecin qui prescrirait une cure de trente ans, pendant laquelle l’objet de l’addiction serait disponible à volonté pour le patient ou la patiente ?
C’est la situation dans laquelle nous sommes. Nous sommes addicts aux énergies fossiles, et les prescriptions de nos gouvernants sont inefficaces pour éliminer notre dépendance.
A notre échelle d’élus locaux, nous améliorons le traitement. Dans toutes nos politiques, nous tenons désormais compte du changement climatique et nous avons un plan pour nous y adapter. Ce plan, nous le suivrons, nous mesurerons son avancement et ses conséquences concrètes. C’est nouveau, mais c’est pourtant le minimum.
Ce qui est moins nouveau – et nous en sommes consternés – ce sont les 503 lobbyistes des énergies fossiles que l’ONG Global Witness a décompté à la COP 26. Pour vous donner une idée, sachez que leur nombre est plus important que celui de la plus grande délégation étatique de la COP. Car ces entreprises savent très bien où les décisions les plus retentissantes sont prises, et ce n’est malheureusement pas à notre échelle que cela se joue (je n’ai personnellement encore jamais vu de lobbyiste de Total venir me contacter pour discuter de la politique de Villeurbanne). Encore une fois, les intérêts privés et de l’argent sont davantage représentés que ceux du plus grand nombre.
C’est d’un changement total de modèle dont nous avons besoin. En nous appuyant sur les travaux d’associations, comme le scénario Négawatt pour l’énergie, en planifiant une action politique immédiate de rupture avec le capitalisme, nous pourrons sauvegarder réellement la biodiversité et freiner le changement climatique. Nous agissons concrètement à Villeurbanne, et nous attendons la même chose des États : assez de fausses promesses, mais des solutions réelles comme la sortie des traités de libre-échange ou un grand plan d’isolation des bâtiments par exemple.
Pour enrayer le changement climatique et la baisse de la biodiversité, il faut donc des actions locales et c’est ce que prévoit ce rapport, réalisé de manière transversale en associant un maximum d’élus, ce qui est très positif. Mais plus que cela : il faut que les grandes entreprises privées cessent de sculpter notre imaginaire social. Je conclus donc avec une citation tirée du livre Les dernières nouvelles du mensonge d’Anne-Cécile Robert : « Pointer du doigt la responsabilité de l’être humain efface opportunément la responsabilité du productivisme ou du mode de production capitaliste au profit d’une sorte de “pensée unique” de lutte de chacun contre le changement climatique qui fait la part belle au capitalisme vert ».