Par Danielle Carasco
Cette délibération est rédigée en deux parties. La première porte sur la stratégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance, qui nous paraît aller dans le bon sens puisqu’elle évoque la prévention et l’insertion. Nous apprécions l’ensemble du texte, très complet et pour sa qualité, hormis l’objectif n° 2 de l’axe de travail 1 qui va élargir et coordonner l’utilisation des caméras de vidéoprotection . La deuxième partie est donc la demande de financements à l’Etat pour installer des caméras de surveillance sur certains boulevards. C’est sur cette demande de financements pour de la vidéosurveillance que nous devons voter ce soir.
Nous l’avons déjà dit dans notre tribune du VIVA, nous le répétons ce soir. Les caméras de surveillance ne font que déplacer les problèmes. Le dealer ira trafiquer dans la rue d’à côté ; le chauffeur ira garer sa camionnette plus loin. L’étude la plus récente sur l’efficacité de ces caméras date de décembre 2021 à Grenoble. Elle a montré que sur 1 939 enquêtes, seules 1,1% étaient élucidées grâce à la vidéosurveillance. Chers collègues, il y a un peu plus d’un an, notre majorité a participé à une réunion où nous avions invité Sébastian Roché, directeur de recherche au CNRS et spécialisé sur les questions de délinquance et d’insécurité. Nous rappelons ici l’un des éclaircissements qu’il nous a apporté : il faut cesser de confondre les outils et les situations qu’ils sont censés régler. Le deal, c’est un problème économique et social ; les personnes mal stationnées, c’est un problème social et un problème de mobilité. Bien poser les problèmes, c’est déjà commencer à mieux y répondre !
Réprimer n’est donc pas suffisant, il faut surtout prévenir et créer de la solidarité ! Si pour régler les problèmes de sécurité routière, on n’avait utilisé que des radars et la gendarmerie, sans que les passagers n’aient de ceinture de sécurité et d’airbags, ou de panneaux sur le bord de la route, nous serions beaucoup moins efficaces qu’aujourd’hui pour prévenir les accidents. Bien sûr, la prévention est sûrement moins voyante à court terme, mais elle est plus efficace à long terme. Nous pensons que l’argent public serait mieux utilisé pour développer davantage l’axe de travail n°3, à savoir renforcer la présence sociale et l’animation, au cœur des quartiers, augmenter le nombre d’intervenants sociaux dans les espaces ouverts au public.
Dans quel monde veut-on vivre ? Prenons un peu de hauteur. La loi sécurité globale, le projet de caméras à reconnaissance faciale porté par Laurent Wauquiez à la région : nous sommes dans une pente de plus en plus technophile, sécuritaire et liberticide. Est-ce que nous voulons vraiment ajouter notre pierre à cet édifice ? Que fait-on de la liberté de circuler sans être filmé ? Quel monde voulons-nous ?
Nous sommes favorables à la stratégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance qui est présentée dans la délibération, mais nous l’avons dit, ce soir, on nous sollicite sur une demande de financement pour de la vidéosurveillance. Nous voterons donc contre cette délibération.