Par Agathe Fort
Il y a un peu plus d’un an, le Huffingtonpost titrait ” Avec le confinement, Netflix engrange un nombre record de nouveaux abonnés “. Peut-être, chers collèges, avez-vous comme 6.7 millions de Français un abonnement à ce site ? Depuis plusieurs années, on assiste à la croissance exponentielle de ces plateformes numériques. Netflix est une forme de culture populaire qu’il ne faut pas critiquer de principe, mais face à la progression de cette culture de masse, homogène et standardisée, autant destinée à proposer des contenus qu’à faire du profit, comment reprendre la main pour que culture rime à nouveau avec réflexion, compréhension, diversité ?
Si de plus en plus de personnes accèdent à la culture numérisée, beaucoup d’autres sont exclues du reste de la production culturelle. Pour vous en donner un exemple frappant, seulement 25 % des ouvriers et ouvrières de notre pays vont au musée au moins une fois dans l’année, contre 60 % des cadres. On sait aussi que beaucoup de quartiers ne contiennent pas d’équipements culturels.
Dans ce cas, comment faire en sorte que chacun et chacune ait accès à de la culture ? Nous pensons que la culture doit être populaire, qu’elle doit partir et s’adresser à tout le monde, qu’elle doit participer à l’éducation populaire. Rendons tout ambulant ! Bibliothèques, théâtres, centres culturels, musées, expositions ; tous ces équipements, toutes les équipes qui y travaillent, pourront se rendre dans les quartiers villeurbannais à la rencontre des habitants et habitantes. C’est d’ailleurs ce qui est prévu avec le projet de “petit théâtre ambulant” par le TNP et le Komplex Kapharnaum. Nous pourrions aussi, pourquoi pas ? jumeler nos établissements scolaires avec des établissements culturels pour encourager nos enfants à développer leurs curiosité et à avoir des pratiques artistiques collectives dès le plus jeune âge. Nous voulons redonner du sens à une jeunesse parfois désœuvrée, donner un égal accès à la culture, créer des liens entre les générations, entre les quartiers, entre les habitants et habitantes.
Nos dispositifs “capitale de la culture” seront d’autant plus intéressants que les gens pourront participer à leur élaboration. Nous avons vu que cela est prévu et nous pensons que c’est une bonne chose que l’expression de tous et toutes puisse se retrouver dans les actions culturelles à venir. La production participative de la culture fait partie de nos objectifs de transition démocratique, tout comme l’accroissement des droits culturels. Sortons du carcan de la culture dominante, et promouvons la diversité des formes de culture pour faire tomber les préjugés culturels.
Car c’est aussi ça, le pouvoir de la culture : elle est un vecteur de lutte contre les discriminations. Vous savez que ce sujet me touche tout particulièrement : nous croyons profondément que la diversité culturelle, l’expression culturelle dans tous les quartiers et pas simplement au centre-ville, peuvent aider à l’égalité entre les citoyens et citoyennes. Les discriminations peuvent être mises au jour, reconnues puis dénoncées grâce à la culture ; et elle peut aussi transformer le regard, et changer ce qui étaient des discriminations culturelles en richesses et en diversité culturelle.
La culture, par tout ce qu’elle nous apporte, doit absolument être considérée comme un bien commun, comme faisant partie de notre patrimoine public. Elle ne doit pas être privatisée, servir les intérêts privés, au risque de se retrouver dévoyée par des mécènes privés qui se servent de la culture pour défiscaliser leurs impôts. Rappelons que chaque “don” est en réalité payé par l’État et l’argent public à hauteur de 60 %, voire 66% dans certains cas ! Ce système libéral fait rupture avec l’égalité que nous souhaitons, car il dirige l’argent public au bon vouloir du privé. Nous lui préfèrerons toujours un financement public, payé par les impôts des entreprises et des particuliers. « Les affaires de l’esprit doivent être libérées de l’esprit des affaires ! »