Le 24 août dernier, l’Ocean Viking, bateau de sauvetage de SOS Méditerranée, a été attaqué pendant près d’une demi-heure par des tirs de garde-côtes libyens. Il secourait 87 rescapés et était dans les eaux internationales. Cet assaut témoigne de la pression toujours plus forte des garde-côtes contre les humanitaires. Et il n’est pas isolé : depuis, d’autres navires d’ONG ou de réfugiés ont été attaqués par balles, blessant grièvement trois personnes et entravant des secours vitaux en mer.
Pourquoi les garde-côtes libyens s’autorisent-ils de telles exactions contre des navires de sauvetage européens ? La réponse est peut-être à chercher du côté de l’Union Européenne elle-même, qui confie le « sauvetage » en mer à la Tunisie et à la Libye. La maltraitance des réfugiés dans ce dernier pays est pourtant connue : extorsions, enlèvements, violences sexuelles, torture, quasi-esclavage parfois. Malgré les alertes des ONG et des réfugié·es, l’UE a renouvelé son contrat avec la Libye jusqu’en 2027, en la finançant à plus de 16 millions d’euros, formant ses garde-côtes, leur fournissant les armes et bateaux qui ont certainement servi aux atteintes contre SOS Méditerranée. Par ailleurs, le média Der Spiegel a révélé la collaboration étroite de FRONTEX avec les garde-côtes libyens : ceux-ci sont alertés par l’agence de l’UE aux frontières de la localisation de personnes en mer, afin qu’ils les interceptent vers la Libye.
Cette politique de l’autruche est scandaleuse. Sans les sauveteurs, la tragédie en mer serait pire et invisible. Qui aurait sauvé les 42 708 personnes secourues par SOS Méditerranée ? Ce n’est pas en refoulant aux frontières les réfugié·es que ceux-ci ne quitteront plus leurs pays ravagés par la famine, les guerres ou la pauvreté. Plutôt que d’entraver les secours, l’Europe devrait sauver elle-même ces personnes ou, a minima, cesser sa coopération avec des pays ne respectant pas les droits humains et aider les humanitaires. C’est une question de dignité humaine.
