Par Olivier GLÜCK
J’aime à dire que la connaissance est un bien commun, peut-être le plus important de nos sociétés. Plus on la partage, plus elle se multiplie et plus l’humanité progresse dans son ensemble.
Grâce à ce partenariat avec l’Université Lyon 2, nous apportons notre soutien à la liberté académique, à la production des savoirs parfois critiques, et à leur enseignement. Je ne pense pas avoir besoin d’expliquer ici en quoi l’indépendance des universités et de leurs savoirs scientifiques est essentielle pour nous éclairer en tant que citoyennes et citoyens, et faire respirer notre démocratie.
Il faut rappeler le contexte de cette délibération pour mieux comprendre son importance. Depuis le mois de mars, l’université Lyon 2 est absurdement attaquée, d’une part par les médias d’extrême-droite de la sphère Bolloré, et d’autre part par certains politiciens. Alors que la présidente de l’université était menacée de mort et placée sous protection policière, alors que son vice-président a été contraint à la démission à cause de polémiques montées sur les réseaux sociaux, c’est le moment qu’a choisi Laurent Wauquiez (devenu « conseiller spécial » à la région Auvergne-Rhône-Alpes dont il n’est pourtant plus le président…) pour annoncer la suppression d’une subvention de près de 19 millions d’euros à cette université et une mission d’information sur de soi-disant « dérives préoccupantes ». Cette instrumentalisation politicienne, pour mieux faire parler de sa personne au moment des élections internes à son parti, est d’une gravité sans nom, comme l’est le risque de stigmatisation et de censure réactionnaire recherché par les auteurs de ces polémiques.
Cette offensive contre Lyon 2 n’est malheureusement pas la seule. En 2021, le même président de région avait suspendu le financement de Science Po Grenoble en prétextant une « dérive idéologique » wokiste, quoi que cela puisse bien vouloir dire. A l’Ecole Nationale Supérieure de Lyon, une conférence sur l’histoire de la Palestine a été interrompue par une vingtaine de personnes hostiles et insultantes. A plusieurs reprises, la préfecture du Rhône a interdit des conférences sur Gaza à l’université Lyon 2. Dans quelle démocratie sommes-nous, pour que la réflexion intellectuelle présente au sein des universités soit attaquée, parfois censurée, lorsqu’elle est non alignée sur certains discours officiels de certains dirigeants nationaux ? Cela fait écho à la politique de Trump ces dernières semaines qui s’est attaquée frontalement aux universités américaines.
A cela s’ajoute les paniques morales lancées et entretenues par certains membres du gouvernement, dans une connivence glaçante avec l’extrême-droite : « islamo-gauchisme », « islamo-wokisme », et désormais « entrisme » : tous ces termes n’ont pour intérêt que de stigmatiser d’une part la religion musulmane, et par ailleurs les oppositions de gauche. On serait bien en peine de définir ces termes, comme le rappelle le CNRS, puisqu’ils ne correspondent à « aucune réalité scientifique ».
Ces débats sans fond empêchent de parler des véritables défis de l’université, au premier duquel la précarité étudiante et enseignante. En décembre 2024, l’ENS de Lyon et l’université de Lyon 2 alertaient sur « la situation financière assez dramatique » dans laquelle elles se trouvent, avec pour cette dernière un déficit de plus de 8 millions d’euros en 2025. Cette austérité est vraie partout en France : certaines universités pourraient même se retrouver cette année en cessation de paiement, ayant déjà épuisé leur fond de roulement. Hausse des dépenses obligatoires, pas assez de recettes, et une dépense par étudiant qui a baissé de presque 10% entre 2008 et 2018 : voilà la vraie urgence de l’université.
Nous voterons bien sûr pour ce rapport.
