Par Julien Ravello
Le 28 septembre 2017, Olivier Glück, pour le groupe Europe Écologie Les Verts Front de Gauche, commençait son intervention ainsi : « Vous nous demandez d’approuver le principe de recours à une délégation de service public (DSP) pour la gestion de la future crèche de la ZAC Maisons-Neuves. Vous n’aurez pas notre approbation […]. Nous considérons qu’à travers cette délégation de service public, vous faites un choix de société qui n’est pas le nôtre. »
Je vous invite à relire la suite de cette intervention que notre groupe partage toujours entièrement, car contrairement à ce qu’a dit madame l’adjointe, ce n’est pas juridique mais pour nous, politique.
Parlons chiffres maintenant. 30 à 50 millions d’euros : c’est ce qu’ont investi la banque Rothschild et d’autres fonds d’investissement dans le capital de grandes entreprises de crèche. Et alors que ces mastodontes en puissance récupèrent toujours plus de parts de marché, les communes leur déroulent en plus le tapis rouge et font exploser le nombre de crèches en DSP.
L’argent du service public ne devrait jamais servir à engraisser une entreprise privée. On pourrait penser que la DSP Jean-Jacques Rousseau est épargnée, mais c’est faux : vous avez vu comme nous dans le rapport de la CCSPL que l’entreprise Léa et Léo a augmenté par exemple ses frais de siège de plus de 4 000€. Pourquoi ? Pour ses propres projets de développement et c’est écrit noir sur blanc ! Nous l’avons déjà dit, nous le répétons aujourd’hui : chaque euro investit dans le service public doit rester dans le service public au service des usagers et des professionnels.
Parlons justement des professionnels. Vous le dites vous-même dans la délibération : « le coût des ressources humaines est plus important en régie municipale ». Oui, le coût des ressources humaines est plus important en régie municipale. Et c’est tant mieux ! Vous en tirez la conclusion qu’une DSP est préférable parce qu’elle coûtera moins cher à la commune ; nous en tirons la conclusion inverse ! La variable d’ajustement du service public ne devrait jamais être le personnel. Car ce sont eux, et souvent elles, qui sont nos premières de cordées. Le service public leur garantit un salaire progressif, la sécurité de l’emploi, des syndicats pour les représenter. Comment nous, majorité de gauche, pourrait-on accepter de les priver de tous ces avantages ?
Vous allez nous dire qu’il est plus facile de recruter des personnels qualifiés dans le privé que dans le public, qu’il y a moins d’arrêts-maladie, d’absentéisme. Mais le délégataire est confronté aux mêmes problèmes. Il suffit de regarder son rapport pour lire, je cite, la « difficulté de recrutement de personnels diplômés ». Justifier la DSP parce qu’on pense qu’on n’arrivera pas à recruter suffisamment est donc absurde puisque c’est le même problème dans le privé, d’ailleurs vous l’avez dit c’est un problème structurel.
On s’interdit de créer une crèche en régie parce qu’elle coûterait 200 000€, sur un budget 2021 de fonctionnement de plus de 134 millions d’euros ! On aurait donc pu sans doute trouver collectivement ces 200 000€. Vous allez nous dire que (re)municipaliser cette crèche nous empêcherait de créer les 90 berceaux supplémentaires prévus dans le programme. Nous pensons que c’est faux. D’ailleurs au vu de la présentation de madame l’adjointe, nous espérons que les prochaines crèches seront bien en régie municipales et qu’on ne fera pas de nouveau des économies.
Je vous le répète : aucune raison valable n’existe pour conserver cette crèche en DSP. Le service public de la petite enfance que nous appelons de nos vœux nationalement est aussi essentiel que l’éducation. Jonathan Bocquet d’ailleurs pour le groupe Cercle Radical Villeurbanne et Place Publique l’ai dit tout à l’heure dans son intervention sur les écoles privées. Nous nous devons d’y mettre les moyens pour les besoins des enfants et des parents, en gardant la maîtrise complète du service et donc du personnel, pour faire un travail que la Ville sait faire, comme pour toutes les autres crèches de Villeurbanne d’ailleurs.
Nous aurions donc voté pour une délibération de remunicipalisation de la crèche Jean-Jacques Rousseau. Nous restons cohérents avec nos valeurs et nos votes des années précédentes et voterons contre cette délibération nous proposant de reconduire la délégation.
Chers collègues, vous ne pouvez pas voter cette délibération sans prendre tout cela en considération et sans être conscients du choix politique que votre vote entérinera.